28 - Je m'ennuie du Nord
Je m'ennuie du Nord.
Je m'ennuie de ces terres arides et désolées où l'homme n'est pas le bienvenu.
Je m'ennuie des ces paysages granitiques écrasés par les grands glaciers, il y a des millénaires de cela, et où seules nos propres limites arrêtent le regard.
Je m'ennuie de l'eau cristalline. Il parait qu'à Pingualuit, on peut voir jusqu'à 37 m de profondeur.
Je m'ennuie de ces arbres rachitiques qui cèdent petit à petit à petit la place à la toundra. Au-delà de cette limite, votre forêt n'est plus viable.
Je m'ennuie des troupeaux de caribous qui traversent la toundra en automne.
Je m'ennuie du hurlement des chiens de traineau qui répondent aux loups.
Je m'ennuie des perdrix, des bernaches et des canards qui annoncent le retour du printemps de leur cri rauque.
Je m'ennuie du craquement de la glace sur la rivière qui précède la débâcle.
Je m'ennuie de cette nature sombre et sauvage, toujours un peu menaçante. Est-ce bien prudent de sortir du village sans un fusil?
Je m'ennuie des jours d'été, longs comme un jour sans pain. Le soleil se couche-t-il vraiment, ou se contente-t-il de faire un bond derrière la ligne d'horizon?
Je m'ennuie des aurores boréales, danse énigmatique des esprits dans la nuit claire.
Je m'ennuie de la lune, si ronde, si rousse et si grosse qu'on dirait qu'elle va nous tomber dessus. Peut-être qu'en grimpant la colline, là-bas, je pourrai la toucher du doigt.
Je m'ennuie de cette vie hors du temps, hors de la réalité, hors de tout.
Je m'ennuierai aussi à ta place, je crois.
RépondreEffacerJe me souviens de tes espaces précédents où je venais musarder de temps à autre. Ils m'ont fait rêver parfois.
Et tu écris toujours aussi bien...